L'Inde et le Pakistan s'accusent d'attaques de drones après une journée meurtrière

L'Inde et le Pakistan se sont mutuellement accusés jeudi d'avoir mené des attaques de drones, aggravant l'inquiétude d'une communauté internationale qui appelle les deux puissances nucléaires à une désescalade.
Mercredi, les armées des deux pays ont échangé d'intenses tirs d'artillerie après des frappes indiennes au Pakistan visant, selon New Delhi, le groupe qu'il accuse d'avoir commis l'attentat du 22 avril dans sa partie du Cachemire. Ces bombardements ont fait au moins 48 morts dans les deux camps, quasiment tous civils.
Jeudi, après une nuit plus calme dans le Cachemire, Lahore, la grande ville pakistanaise frontalière de l'Inde, s'est réveillée au son d'explosions qui ont repris par intermittence. L'Inde a affirmé avoir "neutralisé" la défense aérienne qui y était déployée.
New Delhi assure avoir agi en réponse à une attaque nocturne de "missiles et de drones pakistanais" qui visait des "cibles militaires" sur son sol.
L'armée pakistanaise a de son côté assuré dans la soirée avoir "abattu 28 des 29 drones de fabrication israélienne" envoyés par l'Inde sur au moins neuf villes, certaines abritant des QG militaires ou du renseignement, comme Rawalpindi, la ville-jumelle d'Islamabad.
Le ministre pakistanais des Affaires étrangères Ishaq Dar a assuré que les drones "ont tenté d'attaquer des sites militaires", et ont "visé des civils", en tuant un et blessant quatre soldats.
"Les forces armées indiennes ont visé des radars et des systèmes de défense aérienne en plusieurs endroits du Pakistan", a déclaré le ministère indien de la Défense, précisant que les installations de Lahore avaient été "neutralisées".
Jeudi dans la soirée, de fortes explosions, dont l'origine n'a pas été déterminée dans l'immédiat, ont secoué l'aéroport de la ville de Jammu, au Cachemire indien, a indiqué une source sécuritaire à l'AFP.
"Nouvelle escalade" ?
Pour sa part, l'armée pakistanaise a dénoncé un "nouvel acte d'agression" de l'Inde mené avec des drones d'attaque de fabrication israélienne "Harop", soit des drones kamikazes.
A Rawalpindi, aux abords d'un périmètre fermé par les forces de sécurité, Wajid Khan, employé de la Défense civile, incitait le public à "ne pas céder à la panique et rester chez soi".
A Karachi, la capitale économique, l'indice boursier de référence a chuté après l'annonce des attaques au drone, entrainant une suspension des échanges.
L'aviation civile pakistanaise a fermé l'aéroport de Karachi, qui doit rouvrir à minuit.
Au même moment, le ministre indien des Affaires étrangères Subrahmanyam Jaishankar assurait à son homologue iranien Abbas Araghchi, venu en médiateur, qu'il n'était "pas dans (l')intention (de l'Inde) de causer une nouvelle escalade".
Toutefois, a-t-il ajouté, toute attaque du Pakistan suscitera "une réponse très ferme".
Le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif s'est de son côté entretenu jeudi par téléphone avec le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio, "condamnant fermement les frappes de missiles et de drones menées par l'Inde", a indiqué son bureau.
M. Rubio a pour sa part indiqué que "les Etats-Unis suivaient la situation de près" et a appelé les deux voisins à "travailler ensemble pour désamorcer la situation".
Frontière embrasée

Dans les jours qui ont suivi l'attaque du 22 avril -- dont New Delhi tient Islamabad responsable malgré ses démentis -- les soldats postés des deux côtés de la frontière de facto au Cachemire ont commencé à échanger chaque nuit des tirs à l'arme légère.
Mais dans la nuit de mardi à mercredi, la situation s'est brutalement détérioriée : après les frappes indiennes, les soldats pakistanais ont sorti l'artillerie et bombardé sans répit la partie indienne de la région majoritairement musulmane que les deux pays se disputent.
Ces échanges de tirs, les frappes indiennes et le face-à-face dans les airs qui se sont poursuivis dans la journée ont fait franchir mercredi un nouveau palier à la rivalité entre les deux Etats, nés en 1947 d'une douloureuse partition.
Pour les experts, une telle intensité n'avait pas été atteinte depuis deux décennies.
Comme le Premier ministre indien Narendra Modi l'avait promis, son armée a riposté en détruisant neuf "camps terroristes", soigneusement identifiés pour "éviter la population ou des secteurs civils", selon le ministre de la Défense, Rajnath Singh.
Mais les missiles indiens qui ont plu sur six villes au Cachemire et au Pendjab pakistanais et les échanges de tirs le long de la frontière contestée ont fait 32 morts et 57 blessés côté pakistanais, selon le dernier bilan de l'armée.
Islamabad affirme avoir "abattu cinq avions indiens" dans l'espace aérien de son voisin. Une source sécuritaire indienne a seulement indiqué à l'AFP que trois chasseurs s'étaient écrasés, sans précisions.
Les deux voisins étaient sur le pied de guerre depuis l'attaque qui a fait 26 morts à Pahalgam, une ville touristique du Cachemire indien, et n'a pas été revendiquée.
L'Inde a attribué celle-ci à un groupe jihadiste basé au Pakistan, le Lashkar-e-Taiba (LeT), et a accusé son voisin.
"Qu'ils arrêtent"
Dans la capitale du Cachemire pakistanais Muzaffarabad, dont une mosquée a été visée par les frappes indiennes, plusieurs maisons ont été détruites, et certains habitants blessés, comme la fille de 15 ans de Safeer Ahmad Awan.
"Un éclat d'obus a transpercé la poitrine de ma fille", raconte ce père de 50 ans à l'AFP.
"Ce n'est que lorsque ses vêtements ont commencé à être tachés de sang que nous avons découvert la blessure", a-t-il ajouté, précisant que le morceau de métal n'a pas encore pu être extrait.
De l'autre côté de la frontière de facto, dans la ville de Poonch, dans le Cachemire administré par l'Inde, Madasar Choudhary raconte que sa soeur a vu deux enfants être tués sous ses yeux.
"Elle était à la maison lorsque les premiers obus sont tombés", raconte le jeune homme de 29 ans.
"Elle a vu deux enfants sortir de chez son voisin en courant et a crié pour leur dire de rentrer se mettre à l'abri", a-t-il poursuivi. "Mais des éclats les ont atteints et ils sont morts..."

Au total, l'Inde recense 16 civils tués, dont trois femmes et cinq enfants.
De nombreuses capitales ont renouvelé leurs appels à la retenue. "Je veux qu'ils arrêtent", a lancé le président américain Donald Trump.
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